J’ai vécu dans un orphelinat jusqu’à mes 18 ans, lorsque j’ai réussi à trouver mon premier emploi en tant que vendeuse dans un magasin de disques. Je n’ai jamais connu ma famille, tout ce que je savais, c’était que ma mère m’avait abandonné à ma naissance. Je n’ai jamais cherché à la retrouver mais durant toute ma vie, je me suis sentie terriblement seule, ne me sentant bien dans aucune famille qui m’acceptait. Il y avait un vide en moi que je ne pouvais combler et que personne ne pouvait combler. Tout ce que je pouvais faire, c’était d’accepter cette réalité et d’avancer dans la vie au lieu de la détruire. Je travaillais dur à l’école afin de pouvoir réaliser quelque chose plus tard, faire de grandes études et d’être reconnue dans mon travail. Je m’en sortais plutôt bien. Puis, à mes dix-huit ans, j’ai trouvé du travail afin de payer mes études et de voler de mes propres ailes. J’étais fière et indépendante à cette époque, avant que je rentre l’homme qui a brisé ma vie après l’avoir reconstruite.

Je l’ai rencontré au magasin et ce fut le coup de foudre. Tout se passait pourtant bien entre nous. Pendant plusieurs mois nous nous sommes vus, sortant à droite à gauche, profitant de la vie et de la jeunesse tout simplement. Je l’aimais, oh que oui je l’aimais, et peut-être que je l’aimais toujours. C’était même la première fois que je me sentais aussi bien avec un homme. D’ordinaire, j’étais avec des femmes mais il fallait croire qu’il y avait un début à tout. Nous avons fini par habiter ensemble et ce fut là que tout se gâta. Il devint possessif et affreusement jaloux. J’ai cru que cela lui passerait, en vain. Refusant de glisser sur une telle pente, je mis les points sur les « i », voulant discuter avec lui afin d’arranger la situation. Notre relation eue des hauts et des bas pendant presque 2 ans de notre vie commune mais j’acceptais, pensant qu’avec le temps, tout finirait par s’améliorer. Je ne baissai pas les bras, ne voulant pas l’abandonner comme on m’avait abandonné. En fait, c’était de me retrouver seule qui m’effrayait. Dans le fond, ce n’était pas vraiment pour lui mais pour moi. Pourtant, le quitter m’avait plusieurs fois traversé l’esprit et j’aurai dû écouter mon instinct.

J’avais 21 ans lorsque je découvris ma grossesse. J’étais heureuse mais il y avait un point noir sur le tableau. Comment mon petit ami prendrait la nouvelle ? Il fut surpris mais heureux, un sacré soulagement pour moi. Avoir des responsabilités le changeraient peut-être. Je ne savais pas si c’était de la naïveté qui avait fait que je n’étais pas parti plus tôt. Un être tel que lui ne changeait jamais. Cependant, il n’avait jamais été violent, j’avais donc été dans mon droit d’imaginer une amélioration. J’ai eu tort. Cette violence a fini par sortir et il a suffi d’une seule fois pour répliquer. Il m’a frappé, je l’ai frappé en retour. Ce n’était plus moi que je voulais protéger, c’était notre enfant. Dès cet instant, j’ai fait mes valises afin de le quitter. Il ne l’a pas accepté. Le plus grand avantage aux Etats-Unis était la libre circulation des armes à feux. J’avais toujours été contre, ayant conscience des dérives et des drames que cela pouvaient engendrer. Pourtant, ce jour-là, j’étais bien heureuse de l’avoir entre les mains.

Qu’il me touche encore une fois et je tirerais. Il le savait parfaitement, je n’allais pas m’enfuir ou me rabaisser face à lui. Je le voyais dans son regard, il était dangereux et je m’en étais aperçue que trop tard. Cet enfant que je portais était tout pour moi et j’allais tout faire pour le protéger. Le coup partit, l’abattant immédiatement. Je savais parfaitement m’en servir malgré mon opinion sur le sujet. Je fini par lâcher mon arme et par pleurer. J’avais tué, ce n’était pas quelque chose d’anodin. Ce fut les voisins qui arrivèrent en premier, puis la police. La légitime défense m’a permis de garder ma liberté mais je voulais partir, tout abandonner, fuir ce passé, fuir ce pays qui m’avait causé que des souffrances.

J’ai attendu d’accoucher avant de prendre l’avion pour l’Ecosse. Je me suis installée à Glasgow où j’ai pu trouver un emploi de serveuse en attendant d’avoir mieux. Et durant mes temps libres, je m’occupais de ma petite fille : Gabrielle. De plus, j’ai pu réaliser un rêve d’enfant : apprendre à monter à cheval et ma fille adorait cela également. Elle avait 3 ans, l’âge où il était possible de faire du baby poney. Elle était heureuse et moi aussi, enfin, presque. Ce passé me hantait et je suis devenue difficile à vivre, craignant aussi le jour où Gabrielle demandera des informations sur son père. Je me réfugiais parmi les chevaux, voyant en eux un moyen d'avancer et de rester forte pour ma fille. Cette épreuve m'a endurci, me rendant plus méfiante et très protectrice. J'avais besoin de refaire confiance aux autres, choses quelque peu difficile.